I/ DROIT BANCAIRE

 

1) Point de départ du délai de prescription d'une action en responsabilité pour manquement à l'obligation de mise en garde du banquier

Cass. com., 26 janv. 2010, n° 08-18.354, FS P+B, Cts S. c/ Crédit lyonnais : JurisData n° 2010-05141

La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits.

 

2) Banque: le devoir de mise en garde s'efface devant la valeur des garanties fournies:

 

CC 1ère civ. 17 décembre 2009 n°08-11.866,D

 

La Cour de Cassation précise lorsque les biens donnés en garantie d'un crédit permettent de faire face au remboursement de celui-ci, la Banque est exonérée de son devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur sans avoir à recherché si ce dernier à la qualité d'emprunteur averti ou non averti.

3) Point de départ de la prescription en matière d'action en nullité du TEG

Cass. 1re civ., 11 juin 2009, n° 08-11.755, P+B+I

La première chambre civile rappelle que, selon elle, ce délai court à compter du jour ou l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux.

 

4) Manquement à l'obligation de mise en garde et perte d'une chance

Cass. com., 20 oct. 2009, n° 08-20.274, P B I

Le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son obligation de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter.

Un établissement bancaire consent à un particulier un prêt en vue du financement d'un fonds de commerce, prêt dont sa mère de l'emprunteur se rend caution.

En raison de la défaillance de l'emprunteur, la banque assigne la caution en exécution de son engagement. Cette dernière invoque un manquement de la banque à son obligation de mise en garde.

La cour d'appel condamne la banque à payer à la caution une indemnité égale au montant de la dette, retenant que le préjudice découlant du manquement de la banque à son devoir de mise en garde envers la caution consiste pour celle-ci à devoir faire face au remboursement du prêt consenti à sa fille à concurrence du montant de son engagement.

La décision est censurée par la Cour de cassation : "Attendu que le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son obligation de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter ; Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé (l'article 1147 du Code civil) ".

5) Étendue du devoir de mise en garde d'un établissement de crédit:

  Cass. 1re civ., 19 nov. 2009, FS P+B+I, n° 08-13.601

Les débiteurs font griefs à la cour d'appel de ne pas avoir recherché s'ils avaient la qualité d'emprunteurs non avertis « et, dans l'affirmative, si [l'établissement de crédit] justifiait avoir satisfait à son obligation de mise en garde à raison de leurs capacités financières et des risques de l'endettement nés de l'octroi des prêts », en violation de l'article 1147 du Code civil.

La Cour de cassation juge que la cour d'appel a souverainement retenu que le crédit « était adapté aux capacités financières des emprunteurs ». Par conséquent, « la banque n'était pas tenue à mise en garde ».

 

II/ DROIT IMMOBILIER, CONSTRUCTION

 

1) Bail Commercial: Le droit de repentir du Bailleur: conditions:

 

CC 3ème civ. 10 mars 2010 n°09-10.793

Le droit de repentir permet au Bailleur qui a refusé le renouvellement du bail (avec ou sans indemnité d'éviction) de revenir ensuite sur sa décision (art. L145.58 code de commerce).

Deux conditions doivent être réunies, ce droit ne peut être exercé qu'autant que le Preneur est encore dans les lieux et n'a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation.

 

2) Bail Commercial: refus de renouvellement de bail sans indemnité justifié pour cause de violation d'une interdiction administrative.

 

CC CIV. 3ème 2 JUIN 2010

La violation par le PRENEUR d'une interdiction administrative justifie le refus de renouvellement sans indemnité notifié par le BAILLEUR.

3) La directive relative à la performance énergétique des bâtiments a été révisée

A été publiée au JO UE du 18 juin 2010, une refonte de la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Cette directive révisée introduit notamment la notion de Bâtiment à consommation quasi nulle, d'ici fin 2018 pour tous les nouveaux bâtiments publics, et d'ici fin 2020 pour tous les nouveaux bâtiments. De même, elle met en place une certification de la performance énergétique, avec des exigences d'inspection régulière des procédés de génie climatique.

4) Charges locatives: tout sauf les charges de l'article 606 cc:

Cour d'appel Grenoble Chambre commerciale   10 Septembre 2009 N°08/01009

Lorsqu'une stipulation d'un bail commercial prévoit que le preneur s'oblige à supporter les réparations de toute nature à l'exclusion des grosses réparations définies à l'article 606 du Code civil , le preneur doit prendre à sa charge les travaux de réfection des façades et des balcons de la résidence, de remise en état des descentes d'eaux pluviales de la copropriété, d'installation d'un ascenseur, d'un digicode ainsi que les travaux d'embellissement du hall d'entrée dès lors que rien ne permet d'affirmer que ces travaux tendent à remédier à un désordre grave qui, soit porte atteinte à un des éléments essentiels de l'immeuble, soit, par sa généralité, l'affecte dans son existence ou sa destination. Ces travaux correspondent à des réparations d'entretien, utiles au maintien permanent en bon état de l'immeuble et doivent rester à la charge du preneur en vertu des dispositions contractuelles, les dispositions relatives aux baux d'habitation de la  loi du 6 juillet 1989 et de la loi du 1er septembre 1948  étant inapplicables en matière de baux commerciaux ainsi que les dispositions relatives à la définition des charges communes de la loi du 10 juillet 1965 .

5) Bail commercial, démembrement de propriété et refus de renouvellement

Cass. 3ème civ., 9 déc. 2009, n° 08-20.512, P + B


L'usufruitier d'un immeuble à usage commercial donné à bail a le pouvoir de refuser seul le renouvellement du bail.

Cassation car "en statuant ainsi, alors que l'usufruitier d'un immeuble à usage commercial donné à bail a le pouvoir de délivrer seul un congé au preneur et que le refus de renouvellement a les mêmes effets qu'un congé, la cour d'appel a violé l'article 595, alinéa 4, du Code civil, ensemble l'article L. 145-10 du Code de commerce ".

6) nouveaux désordres: De la réparation d'un dommage non inclus dans la demande initiale

Cass. 3e civ., 12 janv. 2010, n° 08-20.575, D

 

La demande nouvelle qui tend à la réparation de ce préjudice a un objet différent de celle ayant donné lieu à la précédente instance.

Une SCI propriétaire d'un immeuble se plaint d'infiltrations en provenance d'un mur la séparant d'un immeuble collectif. Les juges du fond la déboutent par deux fois faute de preuve suffisante des dommages.

Devant la Cour de cassation en revanche, elle obtient la cassation de l'arrêt qu'elle conteste : lors de la première instance, les infiltrations touchaient à une partie de l'immeuble, devant la cour d'appel, il s'agissait d'une autre partie.

Ainsi, la demande nouvelle qui tend à la réparation de dommages constituant des éléments de préjudice non inclus dans la demande initiale a un objet différent de celle ayant donné lieu à la précédante instance ; l'autorité de la chose jugée ne fait donc pas obstacle à son nouvel examen.

Pour constater l'autorité de la chose jugée d'un jugement, il faut "que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité".

7) Fonds de commerce et baux commerciaux: Location-gérance : nouveau contrat et obligation d'immatriculation:
Cass. com., 19 janv. 2010, n° 09-11.153

Un contrat de location-gérance reconduit tacitement est un nouveau contrat, dont la nullité ne peut être invoquée sur le fondement de la loi applicable au contrat initial.

Un commerçant avait donné son fonds de commerce en location-gérance alors qu'il était inscrit au RCS depuis moins de sept ans, condition alors requise pour conclure un tel contrat.

Ce contrat a été reconduit tacitement, postérieurement à l'ordonnance n° 2004-724 du 25 mars 2004 supprimant cette condition.

Suite à un litige entre les deux cocontractants, le locataire a invoqué la nullité du contrat. La cour d'appel a fait droit à sa demande.

La Cour de cassation casse l'arrêt de la cour d'appel au motif que le contrat reconduit tacitement constitue un nouveau contrat, auquel ne s'applique pas l'obligation des sept ans.

8) Modalités de retrait d'un permis de construire

Réponse ministérielle  à QE n° 59747, JOAN Q. 26 janv. 2010, p. 840

Les conditions de retrait d'un permis de construire, exprès ou tacite, sont précisées dans une réponse ministérielle du 26 janvier 2010.

Faute de refus explicite dans le délai de 2 mois, une demande de permis de construire est l'objet d'une acceptation tacite. Si cette décision n'a pas encore été suivie ni de l'engagement des travaux, ni de l'installation sur le terrain d'un panneau informant les tiers, le maire peut-il a posteriori annuler cet octroi tacite du permis ?

Saisi de cette question, le ministre de l'Ecologie revient sur les modalités de retrait d'un permis.

L'irrégularité est la condition indispensable pour effectuer un retrait d'un permis exprès ou tacite : il doit être entaché d'une irrégularité de forme et/ou de fond. Un permis régulièrement délivré ne peut faire l'objet d'un retrait.

Le délai pendant lequel l'autorité compétente peut retirer un permis est fixé à 3 mois. La date de déclenchement du délai varie : pour un permis exprès, il se déclenche à la date de la signature du permis ; pour un permis tacite, il commence à compter de la date d'échéance du délai implicite d'acceptation (équivaut au délai d'instruction éventuellement majoré).

L'autorité doit justifier sa décision et permettre au particulier d'exprimer son point de vue. Le défaut de motivation constitue un vice de forme substantiel qui entraîne l'annulation par le juge.

 

III/ DROIT DE LA RESPONSABILITE

1) Point de départ du délai de prescription d'une action en responsabilité pour manquement à l'obligation de mise en garde du banquier

Cass. com., 26 janv. 2010, n° 08-18.354, FS P+B, Cts S. c/ Crédit lyonnais : JurisData n° 2010-05141

La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits.

 

 

 

IV/ VOIES D'EXECUTION ET MESURES CONSERVATOIRES

 

1) Obligation d'information du tiers saisi : en cas de déclaration incomplète ou inexacte,  sa responsabilité relève du droit commun

Cass. 2e civ., 10 sept. 2009, n° 08-18.590, P+B


la Cour de cassation confirme qu'il ne sera sanctionné que si le lien de causalité entre la faute et le préjudice est rapporté.

L'article 60 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 prévoit les sanctions du non respect de l'obligation d'information de l'huissier de justice qui pratique la mesure d'exécution par le tiers saisi. Celui-ci peut soit ne pas fournir les renseignements prévus et dans ce cas être condamné à payer les sommes dues aux créanciers, soit le faire mais en étant négligent ou inexact et dans ce cas risquer une condamnation au paiement à des dommages-intérêts.

Dès lors, pour l'application de la sanction de la déclaration inexacte ou incomplète, le juge doit vérifier que les éléments de droit commun de mise en œuvre de la responsabilité sont réunis : une faute, un préjudice, et un lien de causalité entre ceux-ci.

2) Saisie des rémunérations : pouvoir du juge en matière de compensation

Cass. 2e civ., 21 janv. 2010, n° 09-65.011, P+B

Le juge doit vérifier le montant de la créance servant de cause à la saisie et trancher la contestation relative à l'exception de compétence soulevée par la débitrice.

Il appartenait au juge d'instance, juge de la saisie des rémunérations par application des articles L. 221-8 du Code de l'organisation judiciaire et L. 3252-6 du Code du travail, de vérifier le montant de la créance servant de cause à la saisie des rémunérations du travail et de trancher la contestation relative à l'exception de compétence soulevée par la débitrice.

Il exerce alors les pouvoirs du juge de l'exécution par dérogation aux dispositions de l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire.

Ainsi, le juge d'appel qui avait refusé la compensation entre les sommes dues au titre des loyers impayés et le dépôt de garantie doit être sanctionné.

 

V/ ENTREPRISES EN DIFFICULTE

1) déclaration de créance et relevé de forclusion:  attention au délai préfixe d'un an à compter du jugement d'ouverture

Cour de cassation Chambre commerciale  3 Novembre 2009 N° 07-13.485

Mais attendu que si aucun texte n'oblige le créancier défaillant à déclarer sa créance avant de saisir le juge-commissaire de sa demande de relevé de forclusion, il est néanmoins tenu de la déclarer dans le délai préfix d'un an à compter de la décision d'ouverture de la procédure ; qu'après avoir relevé qu'en dépit d'une relance effectuée le 11 janvier 2005 par le représentant des créanciers, Mme X... n'avait pas déclaré sa créance dans les délais légaux, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu l'objet du litige, en a exactement déduit que la créance de Mme X... était éteinte ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

 

VI/ GARANTIES ET SURETES:

 

VII / DROIT DE LA FAMILLE, SUCCESSIONS, DROIT DES PERSONNES

 

1)  Partage amiable : point de départ des intérêts légaux

Cass. 1re civ., 17 juin 2009, n° 08-10.142, P+B+I

Les intérêts de retard afférents au paiement d'une soulte consécutive à un partage amiable ne peuvent être dus pour une période antérieure au commandement de saisie-vente.

 

VIII/ ASSOCIATIONS & FONDATIONS

 

1)  Capacité d'agir en justice de l'association

Comme toute personne morale, une association doit se faire représenter par une ou plusieurs personnes physiques. Cette représentation est organisée par des clauses statutaires, à défaut de quoi, il est nécessaire d'organiser un mandat spécial (Cass. 1re civ., 19 nov. 2002 : JurisData n° 2002-016416 ; JCP G 2003, II,1005, L. Boré ; D. 2003, p. 21 ; Bull. Joly 2002, § 49, note L. Grosclaude). Le président, à défaut, ne peut pas agir seul. La solution pourrait toutefois être contraire en matière de référé car il y a urgence et que les décisions prises ne sont pas définitives (CE, 13 nov. 2002 : JurisData n° 2002-064569 ; JCP G 2003, II, 10059, L. Boré).

Le processus de prise de décision d'une action en justice doit être organisé par les statuts, à défaut de quoi, les tribunaux estiment que le représentant est également compétent pour décider de l'action (Cass. 1re civ., 7 nov. 1995 : Dr. sociétés janv. 1996, n° 5. - CE, 5 mars 1999 : D. 1999, inf. rap. p. 93). Dans le silence des statuts, l'assemblée est compétente pour prendre la décision d'agir (Cass. soc., 16 janv. 2008 : Bull. Joly Sociétés 2008, p. 405 s., note P. le Cannu ; D. 2008, p. note Karine Rodriguez).

L'association peut agir en défense de son intérêt propre, de celui de ses membres, de ceux de personnes qui l'ont mandatée, et sur habilitation principalement, de grandes causes. Au-delà, l'association n'a pas le pouvoir d'agir. Notamment, la Cour de cassation a décidé qu'une association de porteurs de parts de sociétés, elle-même porteuse de quelques parts, ne pouvait exercer l'action sociale ut singuli. L'action tend à obtenir la réparation d'un préjudice causé à la société. Or, une association n'a pas qualité pour agir en défense d'un intérêt différent de son intérêt propre ou d'un intérêt collectif de ses membres (Cass. com., 3 mars 2004 : Bull. Joly 2004, § 199 ; Dr. et patrimoine 2004, n° 128, 3517).

Est évidemment recevable l'action de l'association tendant à défendre ses intérêts propres. Par exemple, une association ayant subi un préjudice pécuniaire peut agir en justice pour concurrence déloyale.

Défense des intérêts collectifs de ses membres - L'action tendant à la défense des intérêts collectifs des membres suppose qu'une atteinte soit portée à l'intérêt individuel de tous, de quelques uns, voire d'un seul membre. Elle subit des réticences parce qu'alors l'association ne défend plus un intérêt direct et personnel. Il s'agit par exemple d'une association de résidents qui agit pour trouble de voisinage, des comités de soutien, des ligues de défense.

C'est pourquoi, l'action civile devant les juridictions pénales pour la défense des intérêts collectifs des membres est irrecevable (Cass. crim., 12 févr. 1997 : Bull. crim. 1997, n° 57).

Toutefois, les juridictions civiles l'ont admis, au sein de la jurisprudence dite des "ligues de défense". Il existe en revanche une condition essentielle : que la défense contre le préjudice, ressenti par au moins un adhérent, entre dans l'objet de l'association (Cass. soc., 11 oct. 1994 : RJDA 12/94, n° 1313). L'adhérent peut agir dans le même temps en défense de son intérêt personnel. On se demande comment justifier théoriquement ce droit d'action de l'association. Chaque sociétaire aurait-il fait apport de son intérêt personnel à l'association ? Aurait-il donné mandat à l'association ? Ces explications ne sauraient convaincre car les sociétaires ne perdent pas leur droit d'agir. C'est pourquoi, il a pu être considéré que l'association a subi un préjudice personnel, un préjudice par ricochet.

Représentation conjointe d'autrui - La loi habilite certaines associations à exercer l'action en "représentation conjointe" : les associations agréées de consommateurs, les associations de défense d'investisseurs, et les associations agréées de protection de l'environnement. Si au moins deux personnes physiques, ayant subi un préjudice résultant d'une cause commune et généré par un même professionnel, donnent mandat à l'association, celle-ci peut agir devant toute juridiction en défense de leur intérêt. Les victimes perdent en contrepartie leur droit d'agir personnellement.

Défense d'intérêts collectifs de portée générale - Il est exceptionnellement permis à l'association de défendre l'intérêt collectif, une grande cause, plus précisément, la cause telle que la décrivent les statuts, car elle ne subit pas un préjudice direct.

Au civil, seules quelques associations ont été habilitées par le législateur. Notamment, les associations agréées de défense des consommateurs peuvent agir en responsabilité ou en en cessation à condition de démontrer un préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs (Cass. 1re civ., 5 oct. 1999 : RJDA, 11/99, n° 1255). Or, l'intérêt collectif des consommateurs se trouve concerné dès lors qu'une atteinte est portée au Code de la consommation ("la stipulation de clauses abusives constitue en elle-même une faute de nature à porter atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs" : Cass. 1re civ., 1er févr. 2005 : D. 2005, p. 487) ; à moins que cette atteinte à l'intérêt collectif ne découle désormais du nombre important de procédure engagées individuellement contre la personne poursuivie (Cass 1re civ., 13 nov. 2008 : JurisData n° 2008-045832 ; Contrats, conc. consom. 2009, comm. 29, note G. Raymond). Mais la jurisprudence a progressivement admis l'action d'associations non habilitées. D'abord, elle a semblé parfois admettre en référé la recevabilité d'actions d'associations non habilitées pour faire cesser un trouble manifestement illicite aux causes qu'elles défendent (Cass. 1re civ., 14 nov. 2000 : Bull. civ. 2000, I, n° 289). Ensuite, et le mouvement est beaucoup plus récent, la Cour de cassation considère désormais, sur le fondement de l'article 31 du Code de procédure civile, qu'une association peut agir en justice au nom d'intérêts collectifs, dès lors que ceux-ci entrent dans son objet social (Cass. 2e civ., 27 mai 2004 : D. 2004, p. 293 ; RTD com. 2004, p. 255. - Cass. 3e civ., 26 sept. 2007 : D. 2007, p. 2760, obs. F. Nési ; JCP G 2008, II, 10020, note B. Parance ; RTD civ. 2008, p. 305, obs. B. Fages ; D. 2008, p. 2895, obs. P. Jourdain ; L. Boré, Les prémisses d'une consécration générale du droit d'action des associations au plan civil : Rev. Lamy dr. civ. 2008, n° 2900). La première chambre civile confirme cette jurisprudence. Elle va même plus loin : il faut, mais il suffit, que les intérêts au nom desquels l'association agit entrent dans l'objet social, car il importe peu que l'action en justice soit envisagée ou non par les statuts (Cass. 1re civ., 18 sept. 2008 : JurisData n° 2008-045004 ; Dr. sociétés 2008, comm. 246, note R. Mortier ; JCP G 2008, II, 10200, note N. Dupont ; D. 2008, p. 2437, obs. X. Delpech). Cette jurisprudence semble se distinguer de celle des ligues de défense qui permet, rappelons-le, l'action d'associations non habilitées dès lors que cela entre dans l'objet social pour protéger l'intérêt collectif des membres ; en effet, c'est l'intérêt collectif général qui est désormais défendu et non celui des membres.

 

 

IX/ PROCEDURE

 

1) Ordonnance de référé : pouvoir du président du tribunal de commerce

Cass. 2e civ., 21 janv. 2010, n° 09-12.831, P+B

Le juge des référés commerciaux a le pouvoir d'ordonner l'exécution d'une obligation non sérieusement contestable, même lorsque le juge du fond est saisi.

Selon l'article 873, alinéa 2, du Code de procédure civile, le président du tribunal de commerce " peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation ". Il lui appartient de déterminer si la contestation soulevée par le défendeur est sérieuse sans pouvoir déduire ce caractère de la seule existence d'une instance pendante au fond.

Dès lors, la cour d'appel qui décide qu'il n'y a pas lieu à référé sur la condamnation d'une société à payer par provision le prix des actions objets d'un pacte d'actionnaire viole l'article précité. En effet, les juges d'appel ne pouvaient retenir que la mise en œuvre du droit de retrait de l'actionnaire qui conditionne la réalisation de la cession des actions suscitait un débat au fond que le juge des référés n'a pas le pouvoir de trancher tant qu'il n'a pas statué à l'occasion d'une instance pendant devant le tribunal de commerce sur la réalité et la gravité des motifs de la révocation du demandeur.

2)  Le rapport de l'expert privé associé à l'expert judiciaire doit être préalablement communiqué aux parties.

Cass. 2e civ., 21 janv. 2010, n° 07-13.552, P+B


L'expert judiciaire doit soumettre aux parties la teneur du document de l'expert privé auquel il a fait appel afin de leur permettre d'en débattre contradictoirement.

Dans certaines circonstances, un expert judiciaire peut annexer à son rapport celui d'un confrère, expert privé. Cela se fait particulièrement en matière de responsabilité médicale.

La Cour de cassation décide que l'expert judiciaire doit communiquer le rapport de son confrère aux parties afin qu'elles puissent en prendre connaissance sous peine de violer le principe du contradictoire de l'article 16 du Code de procédure civile.

La cour d'appel ne pouvait donc pas décider que puisque l'expert privé était étroitement associé aux opérations d'expertise et puisque son rapport n'était que la reproduction de ce qui avait été affirmé pendant les réunions d'expertise, l'expert judiciaire pouvait se passer de communiquer le rapport de son confrère.

X/ DIVERS

 

 


www.lefebvre-avocats.fr