VEILE JURIDIQUE N°38 DROIT BANCAIRE: le point sur le TEG

1) TEG : L'écart inférieur à la décimale, entre le TEG mentionné et le taux réel, ne peut entrainer la nullité de la stipulation de la clause d'intérêt conventionnel :

COUR DE CASSATION 1re civ., 25 janv. 2017, nº 15-24.607, FS-P+B
Lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R313-1 du code de la consommation (désormais article R 314-2 du code de la consommation), la nullité de la stipulation du taux des intérêts conventionnels n'est pas encourue

LES FAITS :
Suivant offre du 31 mars 2006, une banque a consenti à un particulier un prêt immobilier au taux effectif global de 3,746 % l'an. La banque lui a fait souscrire des parts sociales pour un montant de 15,00 euros.
Soutenant que leur coût n'avait pas été inclus dans le calcul du taux effectif global qui s'établissait en réalité à 3,748 % l'an, l'emprunteur a assigné la banque en nullité de la stipulation d'intérêts et en restitution des sommes trop versées.
La cour d'appel (CA Grenoble, 30 juin 2015, nº 13/01071) a accueilli cette demande, retenant que les parties ont entendu fixer un taux effectif global à trois décimales et que l'erreur affectant la troisième emporte la nullité de la stipulation du taux des intérêts conventionnels.
Mais, la Cour de cassation énonçant la solution précitée, censure l'arrêt d'appel au visa de l'article 1907 du Code civil, de l'article L. 313-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance nº 2016-301 du 14 mars 2016, et de l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue du décret nº 2002-927 du 10 juin 2002 applicable au litige.

Pour d'autres illustrations : 

  • CC civ 1ère octobre 2014 D2014 2395 note
  • CC civ 1ère 26 /11/2014 JCP 2014 n°1306 obs.
  • CAP AMIENS 1ère ch civ 15 septembre 2016 RG n°14/04184  

2) TEG : Frais d'assurance : Une solution désormais classique rappelée par la Cour de Cassation:

CC, 1ère Chambre civile, Arrêt nº 1035 du 28 septembre 2016, Pourvoi nº 15-20.145

La cour d'appel a retenu, à bon droit, que le coût de la souscription d'une assurance décès, qui ne constituait pas une condition d'octroi du prêt, n'avait pas à être intégré dans le calcul du taux effectif global ;

Pour une autre illustration :

  • CAP PARIS pôle 5 chambre 6, 2 avril 2015 RG n°14/01500

 Le contrat prévoyait l'obligation pour l'emprunteur de justifier dans les deux mois de l'octroi du prêt d'une police d'assurance contre l'incendie des biens : la souscription de l'assurance n'est pas imposée comme une condition d'octroi du crédit, mais comme une condition d'exécution du contrat susceptible d'être sanctionnée par la déchéance du terme du prêt.


3) TEG : Les frais liés aux garanties :

Cour d'appel de Paris, Pôle 5, Chambre 6, Arrêt du 6 octobre 2016, Répertoire général nº 15/09924
Pour l'application des articles L312-4 à L312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels, ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat. (...)'
Pouvoir souverain d'appréciation du juge : 

  • CC 1ère civ 28 septembre 2016 n°15-23.184  


4) TEG : C'est à l'emprunteur de prouver l'erreur affectant le TEG : 

  • CC 1ère civile 1ER juin 2016 Pourvoi n°14-229.678 arrêt n°615
  • CAP DIJON 2ème ch civ 02 juin 2016 RG n°14/00382
  • CAP ROUEN ch. de la proximité 22 septembre 2016 RG n°15/03450

 5) TEG : Sanction : Le juge conserve son pouvoir d'appréciation :

Le juge du fond apprécie souverainement si une déchéance partielle répond au manquement du prêteur et décide du quantum : 

  • CA NIMES 1ère CH CIV 2 mai 2013 RG 12/00948
  • TGI PARIS 9ème ch, 16 avril 2014 RG n°14/06268 

Exemple d'une erreur minime qui ne pouvait légitimer la prétention de l'emprunteur à obtenir la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts
Une telle sanction paraissant au surplus non proportionnée aux griefs allégués par les appelants 

  • CAP VERSAILLES 7 MAI 2015 RG n°14/09803 

La Cour d'appel de Paris a estimé que la sanction applicable au défaut de mention du TEG dans un avenant de renégociation d'un prêt immobilier en contravention des dispositions de l'article L314-14-1 du code de la consommation, se fondait sur une responsabilité de droit commun. La sanction pour la Cour d'appel de Paris n'est donc pas nécessairement automatique et le plaignant doit prouver un préjudicie consécutif aux manquements de la banque à ses obligations et établir le lien de causalité entre les deux.
CAP PARIS 7 mai 2015 pôle 5 ch 6 RG n°14/02033

Cette conception commence à émerger dans la mesure où certains juges admettent qu'en réalité un TEG erroné ne constitue qu'une perte de chance pour l'emprunteur de contracter à un taux concurrent moins élevé

  • CA Limoges, 6e ch. civ., 6 mai 2014, no RG : 13/00683, Mme Y c/ Société Générale.  

Considérant que le TEG, qui exprime la totalité du coût du crédit, est un outil de comparaison, permettant à un candidat à l'emprunt de faire un choix éclairé entre les diverses offres qui lui sont présentées ; que l'irrégularité invoquée par les intimés, selon laquelle le TEG exact serait inférieur à celui annoncé, est favorable à l'emprunteur et n'est pas susceptible de lui nuire, de sorte que la société SPHERE DEVELOPMENT et X... doivent en tout état de cause être déboutés de leur demande de déchéance du droit aux intérêts appliqués au prêt ;

  • Cour d'appel de Paris, Pôle 5, Chambre 6, Arrêt du 6 octobre 2016,
  • Répertoire général nº 15/09924  

Déchéance du droit aux intérêts conventionnels : pouvoir souverain du juge (en l'espèce limite à 1.000 euros)

  • CC 1ère ch civ. 28 septembre 2016 n°15-17.687 


6) TEG : point de départ de la Prescription:

Prêt à un professionnel :

Le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité du TEG est la date de la convention :

C'est une solution ancienne constamment rappelée 

  • CC Com 10 juin 2008 n°06-19.905 Bn°117
  • CC Com 17 mai 2011 n°10-17.397 B.n°77 
  • CC 1ère civile 1er juin 2016 Pourvoi n°15-16.379 arrêt n°600 
  • CC 1ère civile 1er juin 2016 Pourvoi n°15-16.380 arrêt n°601 
  • CAP RENNES 2ème ch 2 septembre 2016 RG 13/03938 
  • CAP AIX EN PROVENCE 8ème ch C 15 septembre 2016 RG n°14/08795
  • CAP MONTPELLIER 21 septembre 2016 RG 14/04604 

Pour le particulier :

La jurisprudence distingue selon que l'erreur est apparente ou au contraire non visible pour un simple particulier:

Le juge doit rechercher si l'emprunteur était en mesure de déceler par lui-même, à la lecture des actes, l'erreur affectant le TEG

Quelques illustrations:

Lorsque le simple examen de l'acte de prêt permet de constater l'erreur alléguée, le point de départ de la prescription est la date de la convention :

  • CC 1ère civ 9 décembre 2015 n°14-2915 

Le point de départ de la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts est la date de conclusion du contrat (date de l'acceptation de l'offre) car l'emprunteur pouvait se rendre compte à la lecture de l'acte de prêt que les frais notariaux incluant les frais d'inscription de PPD n'était pas inclus dans le calcul du TEG, l'erreur alléguée était parfaitement décelable lors de la conclusion du prêt si bien que le point de départ de la prescription est donc la date de l'acception de l'offre

  • CAP PARIS pôle 5 chambre 6, 2 avril 2015 RG n°14/01500 

La Cour de Cassation sanctionne la Cour d'Appel de ne pas établir que l'emprunteur pouvait se convaincre par elle-même, à la lecture de l'acte de prêt ; d'une erreur affectant le TEG

  • Cc civ 2ème ch 12 mai 2016 n°15-15969 

La prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel en raison du caractère erroné du TEG (fondée sur 1304 et 1907 du code civil) court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaitre cette erreur.

  • CAP PARIS pôle 5 chambre 6, 2 avril 2015 RG n°14/01500 

Ou encore lorsque les énonciations de l'acte de prêt révélaient clairement que seuls les frais de dossier étaient inclus dans le TEG, de sorte que les frais de garantie et les honoraires du notaire n'étaient pas pris en compte, considérant dès lors que l'erreur affectant le TEG était décelable dès l'acceptation de l'offre de prêt.... La demande de nullité des emprunteurs est donc prescrite et doit être jugée irrecevable.

  • CC Com 7 février 2012 n°11-10.833
  • CC Civ 2ème, 12 mai 2016 n°15-15.969 
  • CAP PARIS Pôle 5 chambre 6, 22 septembre 2016 RG n°15/07926 

Lorsque l'emprunteur savait ou pouvait savoir que les frais de nantissement du contrat d'assurance vie n'étaient pas inclus dans le TEG,

  • CAP PARIS Pôle 5 ch 6, 5 janvier 2016 n°13/23019 

Considérant que la lecture des deux actes notariés permettait de constater que le coût de l'inscription de la garantie conventionnelle et des primes d'assurance incendie ne figurait pas dans le calcul du TEG ...
Considérant dans ces conditions que Mr et Ma X avaient connaissance ou auraient pu connaître les erreurs alléguées affectant le calcul du TEG dès la date de l'acceptation de l'offre de prêt ...
Considérant que nul n'est censé ignorer la loi ; et qu'en l'espèce Mr et Mad X sont mal fondés à prétendre avoir découvert le caractère erroné du TEG à une date indéterminée, dans les semaines ayant précédée l'assignation.

  • CAP PARIS Pôle 5 chambre 6, 22 septembre 2016 RG n°15/07724 


Il ne peut donc qu'être constaté à la lecture de cet acte que le taux effectif global de 3 99 % ne prévoit pas les frais inhérents aux garanties. X... n'ignorait donc pas que le TEG de 3, 99 % ne comprenait par les frais d'hypothèque dont elle excipe aujourd'hui

Elle n'est donc pas recevable à poursuivre la nullité de la stipulation d'intérêts de ce chef, son action étant prescrite puisqu'elle a eu connaissance dès l'origine de cette irrégularité du TEG et qu'elle n'a pas agi avant le 19 juin 2013, date de l'expiration du délai de prescription, lequel délai décennal non écoulé à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 a couru pour cinq ans à compter de cette dernière date conformément aux dispositions de l'article 2222 al 2 du code civil .
Cour d'appel de Nîmes, 1ère Chambre, Arrêt du 6 octobre 2016, Rg nº 15/03259
La Cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, retenu que, le 26 octobre 2005, l'emprunteur avait reçu du notaire l'acte authentique et le relevé de compte en mentionnant le coût, l'emprunteur était en mesure de constater immédiatement que les frais de notaire n'avaient pas été pris en considération dans le calcul TEG, de sorte qu'il disposait, dès cette date, de tous les éléments d'appréciation quant à la validité du TEG ; qu'elle a souverainement estimé, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que cette date constituait le point de départ de la prescription, de sorte qu'engagée sept années plus tard, l'action en annulation de la stipulation d'intérêt conventionnel était irrecevable comme prescrite ;
Cour de cassation, 1ère Chambre civile, Arrêt nº 1054 du 28 septembre 2016, Pourvoi nº 15-25.593
Sur l'année Lombarde : et point de départ de prescription

Dans l'espèce où l'offre de prêt immobilier stipule que les intérêts sont calculés sur la base d'une année égale à 360 jours, la Cour a jugé que l'emprunteur était donc en mesure de constater dans l'offre de crédit que le taux d'intérêt conventionnel n'était pas calculé sur la base de l'année civile.

Qu'il en résulte que le délai de 5 ans a couru à compter de l'acceptation de l'offre ...et que la contestation du TEG est donc prescrite. 

  • CAP LYON 1ère ch civ. 2 juin 2016 RG n°14/04660

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